mai 2018

« Revisiter les apprentissages et l’acquisition de compétences »

Marc Trestini, directeur du Laboratoire interuniversitaire des sciences de l’éducation et de la communication (Lisec), apporte son point de vue de chercheur sur les nouvelles modalités d’accès à l’enseignement supérieur.

Comment analysez-vous les changements occasionnés par le nouveau dispositif ?

Parcoursup ne va pas révolutionner l’accès à l’université. Mais que le tirage au sort soit éliminé et que les vœux puissent être étayés par des attendus pour que les élèves soient mieux renseignés sur les formations, c’est plutôt positif. Je suis plus réservé sur les lettres de motivation demandées aux lycéens au moment de leurs vœux : peut-on les analyser avec des algorithmes ? Comment un logiciel peut-il comprendre le projet d’un élève ? Les lycéens sont-ils, par ailleurs, préparés à formuler de « vraies » lettres de motivation ? La pression extérieure favorise les compétences de mise en valeur personnelle au détriment des savoirs.

Parcoursup ne va pas révolutionner l’accès à l’université. 

Que pensez-vous des mesures d’accompagnement prévues dans le cas d’une réponse « oui, si » ?

L’accompagnement des étudiants, en cas de réponse « oui, si » devrait donner l’occasion de revisiter les apprentissages et l’acquisition de compétences, de les rendre plus exploratoires, plus actifs : la transmission des savoirs selon des pratiques pédagogiques classiques, du type cours magistraux en amphithéâtre, a montré ses limites. L’enseignant doit certes offrir un cadre propice, mais c’est à l’apprenant qu’il appartient de se mettre en situation de constructeur de ses savoirs. Et cette vision constructiviste de l’éducation pourrait trouver de plus larges terrains d’application dans le cadre des nouveaux dispositifs d’accompagnement des étudiants.  

Que peut apporter le numérique ?

C’est à l’apprenant qu’il appartient de se mettre en situation de constructeur de ses savoirs

Au sein du Lisec, je travaille sur la modélisation des environnements numériques d’apprentissage ; le numérique est, selon moi, un moyen potentiellement pertinent pour améliorer la réussite du plus grand nombre. C’est un vaste champ, à organiser et à développer. Il existe déjà des MOOC – cours en ligne – pour faciliter les apprentissages en licence et France Université Numérique propose même des modules spécifiques aux lycéens, afin qu’ils puissent préparer leur entrée dans le monde universitaire. De façon générale, les étudiants sont invités à profiter de tous les cours transmis en ligne. C’est dans ce contexte que peut se développer, notamment, le concept de classe inversée : les étudiants prennent connaissance des contenus en amont, devant leur ordinateur, et viennent ensuite en débattre en salle de cours. C’est sans aucun doute plus efficace. Autre volet à développer, des dispositifs comme HackeTaFac qui permettent la collaboration d’étudiants entre eux et l’entraide sur les réseaux sociaux.

Des projets pour transformer les usages du campus

HackeTaFac est un concours d’innovation numérique, initié par l'Université de Bordeaux en 2017 et lancé à l’Université de Strasbourg en janvier 2018, qui proposait aux étudiants-candidats, seuls ou en équipe, « d’imaginer des solutions numériques qui rénovent, améliorent, simplifient, transforment, inventent… des outils ou des services en faveur de la réussite étudiante ». Les sept lauréats de HackeTaFac, sélectionnés début avril, vont pouvoir financer et réaliser leur projet d’ici au 31 décembre 2018.

http://hacketafac.unistra.fr/

Témoignages

Crédit photo : © Pascal Bastien

« Avec Parcoursup, on peut vraiment émettre des choix et on trouve beaucoup de détails sur les filières, leurs débouchés ou leurs capacités d’accueil. En plus, le système des choix et leur validation ou non permet de libérer des places pour d’autres étudiants », commente Marion qui aimerait intégrer une filière en physique. « J’ai l’impression qu’avec ce système, c’est vraiment le profil de l’étudiant et pas seulement les notes qui sont prises en compte. Cela peut également éviter les choix qui se faisaient par défaut », commente sa mère Marylène.

Propos recueillis lors de la journée portes ouvertes du 17 février 2018.

Propos recueillis par Myriam Niss