En explorant des territoires de plus en plus diversifiés, l'Université de Strasbourg (Unistra) est en mesure de s'adapter à des formes nouvelles et sur-mesure de coopération internationale.
Un colloque consacré aux idées novatrices en matière de pédagogie de l’écrivain et philosophe indien Rabindranath Tagore s’est tenu, début novembre 2016, à la Maison interuniversitaire des sciences de l’homme - Alsace. Prix Nobel de littérature 1913, Tagore a fondé, au début du XXe siècle, l’Université de Visva Barathi à Shantiniketan (Bengale occidental). Ce colloque pluridisciplinaire a fait se croiser les réflexions, en matière de « manières d’apprendre différentes », de chercheurs de Visva Barathi et de l’Université de Strasbourg. C’est à l’issue de ce colloque, que la relance d’une chaire de Sanskrit et d’études indiennes à Strasbourg a été annoncée.
D’autres coopérations avec des universités indiennes sont en train de se développer
« Pour construire et asseoir les coopérations entre nos universités, il faut concrètement les faire vivre, organiser des lieux et des moments d’échanges, encourager les dialogues entre facultés, enseignants et étudiants... », estime Salomé Deboos, directrice de l’Institut d’ethnologie. D’autres coopérations avec des universités indiennes sont en train de se développer, sous des formes originales qui mettent l’accent, à partir des sciences sociales, sur l’interactivité de différentes disciplines scientifiques. Exemple, ce séminaire thématique organisé au courant de cette année universitaire avec la Jawaharlal Nehru University (NJU) de New Delhi. Intitulé « Health and environment » (Santé et environnement), il permettra des rencontres régulières entre enseignants-chercheurs indiens et strasbourgeois. Un séminaire du même type s’organise avec l’Université de Mumbaï.
Projet-phare pour l’Unistra : une université franco-azerbaïdjanaise a été inaugurée le 15 septembre 2016 à Bakou. 141 étudiants azerbaïdjanais ont pu l’intégrer sur concours national.
Le coordinateur de ce projet est Eckhart Hötzel, directeur de l’Institut de traducteurs, d’interprètes et de relations internationales (Itiri), présent de longue date en Azerbaïdjan dans le domaine linguistique. La création d’un établissement supérieur scientifique franco-azerbaïdjanais – dont les licences vont se spécialiser progressivement en prospection offshore, génie chimique, informatique et ingénierie géophysique – répond à une forte demande du ministère de l’Éducation azerbaïdjanais et représente un gros défi côté Unistra. « Lors de notre prospection, nous avons proposé une université hors-les-murs, mais nos interlocuteurs voulaient un bâtiment très visible et ils y ont mis les moyens ! », rapporte Eckart Hötzel. « C’est aussi un vrai choc culturel », constate Philippe Turek, directeur adjoint de la Faculté de physique et ingénierie et membre du comité scientifique du projet comme Pierre Collet, professeur de l’UFR de mathématique et d’informatique, et Jean-Marc Planeix, directeur de la Faculté de chimie. « Les façons d’apprendre sont plutôt traditionnelles, dans ce pays très hiérarchisé... Cette fois, de jeunes enseignants ont été recrutés sur place et nous assurons la formation de formateurs. » Comme pour La Sorbonne au Kazakhstan, l’idée est d’affirmer la présence française en diversifiant les partenariats et en exportant les savoir-faire. « Il s’agit aussi de récolter, dans quelques années, des doctorants qui auront effectué leur licence et leur master selon des trajectoires que nous aurons dessinées. »
« En matière énergétique, de nouvelles technologies se développent dans de nombreux pays et pour faire avancer la recherche, il est toujours important de voir comment cela se passe ailleurs. » Luis Martinez, professeur à l’École et observatoire des sciences de la Terre (Éost), croit au brassage des savoirs et des expériences. Il est le coordinateur de Petrogas, un programme de formation et de recherche destiné aux étudiants mais aussi – et c’est ce qui en fait l’originalité – à des ingénieurs académiques et industriels et à des enseignants en sciences de la terre mexicains qui souhaitent élargir leur champ de savoirs. Petrogas regroupe cinq instituts universitaires mexicains spécialisés en géologie et en gestion des ressources minérales et énergétiques, ainsi que l’Éost et la Faculté des sciences géologiques de l’Université Complutense de Madrid.
18 étudiants mexicains, répartis de la licence au doctorat, sont venus se former à l’Éost dans le cadre de Petrogas
Sur fond de réforme de l’énergie au Mexique, la conclusion de cet accord a été stimulée également par la demande de l’Ambassade de France à Mexico d’intensifier les activités de coopération interuniversitaire. Depuis 2015, 18 étudiants mexicains, répartis de la licence au doctorat, sont venus se former à l’Éost dans le cadre de Petrogas. Des enseignants ont également pu effectuer des visites et des stages dans plusieurs laboratoires de recherche strasbourgeois, « l’enjeu étant d’y associer aussi des ingénieurs industriels, pour avoir une approche concrète des différents systèmes pétroliers et ainsi pouvoir s’adapter aux réalités respectives ».
Myriam Niss