Mis en place en janvier 2017, le programme Pause géré par le Collège de France a déjà permis d’accueillir 98 enseignements-chercheurs en France, dont trois à l’Unistra.
Le 18 août 2015, Khaled Al-Asaad, ancien directeur du site antique de Palmyre, en Syrie, a été décapité par l’Etat islamique. « Aussitôt, raconte Pascale Laborier, professeure de science politique à l’Université Paris Nanterre, et alors membre du cabinet de Thierry Mandon, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, nous avons été contactés par des collègues archéologues, qui souhaitaient savoir si nous pouvions accueillir des archéologues menacés dans des laboratoires français. » A l’époque, la France, contrairement aux Etats-Unis, au Royaume-Uni ou à l’Allemagne, n’offrait pas de dispositif d’aide pour les scientifiques menacés ailleurs dans le monde. Comble du drame, des dizaines de scientifiques syriens pourtant francophones s’apprêtaient à faire des demandes en Allemagne ou au Royaume-Uni, faute de dispositif en France.
Avec le Collège de France
A peine saisi, le cabinet du ministère s’est mis au travail pour tenter d’évaluer le nombre de personnes susceptibles de demander l’accueil et surtout monter au plus vite un dispositif. Annoncé dès le mois d’octobre par le ministre, celui-ci est officiellement lancé, le 16 janvier 2017. C’est Pause : Programme national d’aide à l’accueil en urgence des scientifiques en exil. Sa gestion est confiée au Collège de France, manière de « préserver son indépendance politique et de le protéger de toutes tentatives de pression de la part de tel ou tel pays », insiste Pascale Laborier. En plus d’une dotation publique d’un million d’euros, un fonds de souscription est mis en place sous l’égide de la Fondation de France, destiné à recueillir les fonds privés pour financer l’accueil des enseignants-chercheurs dans les universités. Etant entendu que chacune d’entre elles paye en réalité la moitié de la dépense.
Le premier appel à candidature auprès des établissements d’enseignement supérieur et de recherche est lancé dès le 23 janvier. C’est un succès : 25 chercheurs sont accueillis. Deux nouveaux appels d’offres ont été lancés depuis avec le même succès. A la fin du mois de novembre, 98 enseignants-chercheurs menacés dans leurs pays étaient accueillis dans les universités et les laboratoires de recherche français grâce à Pause. Ils viennent principalement de Syrie et d’Irak, mais aussi de Turquie ou du Venezuela.
Jean de Miscault
L’accueil d’un enseignant-chercheur coûte dans la réalité entre 30 000 et 80 000 euros, selon qu’il s’agit d’un doctorant, d’un post-doc ou d’un professeur. Afin de compléter les fonds mis à disposition par Pause, couvrant environ la moitié des dépenses, l’Université de Strasbourg a créé, à l’automne 2017, le Face (Fonds d’aide aux chercheurs en exil) doté de 100 000 euros. Ce fonds permet d’aider les laboratoires qui font les demandes : il pourrait permettre de financer l’accueil de trois ou quatre nouveaux enseignants-chercheurs en 2018, qui s’ajouteront aux trois premiers arrivés en 2017.