L’université n’est pas un musée, mais elle a des collections. Si la fonction d’enseignement et de recherche est encore vivace pour certaines d’entre elles, les collections ont également acquis une valeur historique, éducative et esthétique.
Historiquement, les collections universitaires ont été constituées pour produire et diffuser les savoirs. Certaines sont encore largement mobilisées dans ce cadre, comme les collections d’égyptologie ou d’anatomie. Pour servir de référence et permettre la comparaison, l’identification, les collections d’histoire naturelle visaient l’accumulation du plus grand nombre de spécimens, dans une démarche encyclopédique. Leur valeur était liée à la quantité, à leur variété.
Les sciences évoluent, les disciplines et les pratiques aussi. La génétique a supplanté l’approche naturaliste. Des objets et des instruments considérés comme obsolètes ont été relégués au placard. Depuis les années 1990 où un rapport dressait un constat alarmant, on assiste à un regain d’intérêt pour le patrimoine et les collections universitaires.
Elles témoignent de la manière dont on construisait et transmettait le savoir à différentes époques. Strasbourg peut par exemple s’enorgueillir de posséder le premier sismomètre capable d’enregistrer les séismes lointains. Elles témoignent également de l’histoire de l’institution et de la ville. Pour Delphine Issenmann, chargée de l’inventaire et des collections au Jardin des sciences, le lien que l’on peut établir avec l’université et son histoire donne sa valeur à la pièce, d’où l’importance des informations rassemblées à son égard.
Les collections participent bien évidemment à la mission de diffusion de la culture scientifique de l’université, elles sont ouvertes au public à l’occasion des Journées du patrimoine et de la Nuit des musées, lors d’ateliers pour les scolaires. Elles sont mises en lumière grâce à des expositions temporaires. Leur valeur esthétique suscite émotion et émerveillement : beautés de la nature, ingéniosité des instruments en bois et laiton du 19e siècle… Pour Sébastien Soubiran, la dimension culturelle, patrimoniale et esthétique des collections représentent des portes d’entrée pour intéresser le public aux sciences, y compris contemporaines.
Le Jardin des sciences est un service de l’Université de Strasbourg dédié à la culture scientifique et technique. Il représente un cas particulier dans le paysage universitaire français car il est à la fois un Centre de culture scientifique, technique et industriel (CCST) avec un rôle de médiation scientifique en territoire, un centre de sciences avec le Planétarium et un musée de sciences car il gère des collections. Il coordonne les manifestations comme les Journées du patrimoine et la Nuit des musées, et emploie deux chargés de collections (paléontologie et inventaire).
« C’est un endroit où reposent des restes humains, cela incite forcément au respect » rappelle Jean-Luc Kahn, responsable de la collection d’anatomie normale de la Faculté de médecine. Elle rassemble plus de 28 000 pièces comprenant des os, des préparations disséquées, des coupes anatomiques, des crânes… Forcément, ces pièces ne sont pas anodines. La quasi-totalité a été rassemblée avant 1920, avant que le don du corps à la science ne soit légiféré comme aujourd’hui. A l’époque, les collections d’anatomie étaient constituées par les corps des indigents, non réclamés par la famille. Les pièces sont exposées avec un grand soin et beaucoup d’esthétique dans des armoires vitrées au premier étage. Le respect et la déontologie sont les maîtres-mots, les photos ne sont par exemple pas autorisées.