octobre 2017

Un clone virtuel pour chaque patient

Bienvenue dans la chirurgie 4.0 ! Tout se dématérialise, y compris la plus matérielle des disciplines. Avec la start-up Visible Patient, issue des recherches menées à l’Ircad*, les chirurgiens disposent d’un clone virtuel de leur patient pour les assister et préparer l’opération. L’outil intervient également dans leur formation.

Le clone virtuel 3D du patient peut être manipulé et visualisé sur tablette. © Hanebna - Citeasen/Ircad
Le clone virtuel 3D du patient peut être manipulé et visualisé sur tablette. © Hanebna - Citeasen/Ircad

A partir des examens d’imagerie médicale comme le scanner ou l’IRM, Visible Patient reconstitue virtuellement l’intérieur du corps du patient : squelette, vaisseaux, organes, nerfs… Grâce aux algorithmes, il fusionne les différentes informations des images 2D et créé un clone numérique 3D, un double virtuel. « On a une cartographie anatomique virtuelle de chaque patient : le praticien peut alors planifier et simuler l’acte chirurgical avant le bloc opératoire sans risque pour la personne », explique le professeur Luc Soler, directeur scientifique de l’Ircad, enseignant associé à l’Université de Strasbourg et cofondateur de la société Visible Patient.

Un espoir pour les patients jugés inopérables

« Avec la 3D, on peut trouver des solutions thérapeutiques complexes pour des cas qui semblaient désespérés »

Une fois téléchargé, le double 3D peut être manipulé et visualisé librement sur ordinateur, tablette ou smartphone. Le praticien peut « naviguer » virtuellement dans l’anatomie de son patient. D’un clic, il peut rendre transparents les organes pour mieux visualiser les réseaux sanguins ou révéler des parties jusque-là cachées. « Avec la 3D, on peut trouver des solutions thérapeutiques complexes pour des cas qui semblaient désespérés. Grâce au service, des patients considérés comme inopérables ont pu être soignés. Il permet de réduire les risques et la durée des opérations », indique le scientifique.

Pédagogie augmentée

L’outil est également utilisé lors de formations dispensées à l’Ircad en chirurgie mini-invasive auprès des praticiens du monde entier : le modèle 3D sert à présenter le cas, la pathologie, à expliquer la stratégie thérapeutique, dans le cadre des opérations retransmises en direct ou enregistrées. S’agissant de chirurgie mini-invasive, la vidéo fait en effet partie de l’acte chirurgical. Mieux, avec le dispositif de réalité augmentée, le modèle 3D virtuel est superposé en transparence à l’image vidéo réelle du patient, permettant de comprendre et de se repérer beaucoup plus facilement.

Dans les CHU, des équipes médicales y ont également recours dans le cadre de leur formation interne, pour expliquer le cas pathologique du patient, l’anatomie et l’opération envisagée.

Même si les demandes existent, l’outil n’est pas encore intégré dans la formation initiale des médecins. Mais en autoformation, les étudiants peuvent superposer le modèle 3D colorisé aux images 2D des scanners et IRM, pour apprendre à identifier les organes et interpréter correctement les images. Ils peuvent également mieux comprendre l’anatomie, les relations entre organes, avec les modèles 3D types de la base de données disponible sur l’application et le site internet.

* Institut de recherche contre les cancers de l’appareil digestif

Le fruit de 15 ans de recherche

La start-up est issue de 15 ans de recherche à l’Ircad. Créée en 2013 à Strasbourg, elle compte aujourd’hui 13 salariés, ingénieurs, chercheurs, manipulateurs en radiologie, développeurs. A l’heure actuelle, 3000 patients en France et dans le monde ont pu en bénéficier.

Stéphanie Robert