Par le dialogue permanent entre réel et virtuel, la mise en scène numérique des images scientifiques interroge sur la transmission des savoirs. Exemple à l’atelier de didactique visuelle de la Hear (Haute école des arts du Rhin).
L’atelier de didactique visuelle, associé au programme de recherche Didactique tangible, forme à la pédagogie visuelle, appliquée notamment à la médiation scientifique. « Les innovations techniques ont toujours influencé les moyens visuels déployés dans l’illustration scientifique », rappelle Olivier Poncer, qui dirige l’atelier depuis vingt ans. Les supports numériques tactiles, faciles à prendre en main, offrent des interfaces efficaces pour le feuilletage virtuel, la manipulation, la mémorisation... Dans l’atelier, enseignants et étudiants créent ensemble des outils in situ pour les musées (bornes interactives), des DigiDocs (documentaire digital) ou encore des modules interactifs lisibles en ligne et sur tablette tactile.
« La mise en scène numérique doit montrer ce qu’elle apporte de plus que le papier »
La lecture enrichie d’ouvrages anciens, rendue possible par la numérisation des collections, répond au besoin de mettre à disposition du plus grand nombre les trésors cachés de nos bibliothèques. « L’objectif est de naviguer entre l’histoire et la mise en œuvre contemporaine en explorant les potentialités du numérique », explique Olivier Poncer. En 2013, l’atelier a produit une interprétation interactive de l’Atlas anatomique d’Albinus (fin XVIIIe siècle), mettant en évidence l’attention au décor, la relation entre anatomiste et dessinateur... « La mise en scène numérique doit montrer ce qu’elle apporte de plus que le papier ». En chantier, un travail sur l’Atlas anatomique de Bourgery et Jacob (XIXe siècle), pièce superbe en huit volumes de la Faculté de médecine, dans une version coloriée à la main. En projet, la mise en perspective interactive de modèles pédagogiques de l’Université de Strasbourg, en particulier les modèles anatomiques dits clastiques (constitués de pièces démontables) du Dr Auzoux (fin XVIIIe siècle) et modèles d’invertébrés marins de verre de Léopold et Rudolf Blaschka (XIXe siècle).
Un fragment de papyrus antique de 200 à 250 ans après J.-C., composé de courriers administratifs sur une face et d’une copie privée de l'Iliade d'Homère sur l'autre... Un codex du XIe siècle, Moralia in Job... Ces deux documents exceptionnels de la Bibliothèque nationale et universitaire sont à la base d’une publication numérique tactile, Du rouleau au codex. Conçue pour iPad en 2015 par l’atelier de didactique visuelle, téléchargeable gratuitement sur l’App Store, on peut y suivre la fabrication d’une feuille à partir d’une plante de papyrus, s’attarder sur l’art d’écrire à la façon des moines copistes, examiner les différentes étapes d’écriture d’un codex en parchemin et comprendre « de quelle manière apparaît le format qui a donné le livre d’aujourd’hui », résume Olivier Poncer, qui a imaginé le projet avec André Bihler et des étudiants. Rapport aux textes, aux images et à la mise en page, pratiques d’écriture et de lecture pendant les deux périodes concernées : Du rouleau au codex explore les supports de manière ludique et interactive.