février 2019

Les grands chantiers de la fusion

L’audace de la concomitance : fusion et autonomie

Frédéric Dehan, aujourd’hui directeur général des services

Un peu plus d’un an après le vote de la loi relative aux Libertés et responsabilités des universités (LRU), dite loi sur l’autonomie des universités, à l’été 2007, les trois universités strasbourgeoises et l’ex-IUFM fusionnaient en une seule université. Or, cette loi LRU prévoyait les fameuses Responsabilités et compétences élargies (RCE). C’est-à-dire que les personnels, à commencer par leurs fiches de paye, n’étaient plus gérés par le rectorat mais directement par les universités elles-mêmes. « A l’époque, rappelle Frédéric Dehan, aujourd’hui directeur général des services, l’inspection générale avait fait part de ses réserves sur cette concomitance et proposé de décaler le calendrier d’application du passage aux RCE. Mais le choix politique a été de dire : ‘’On fait tout en même temps.’’ »

Nous sommes l’université française qui présente les meilleurs ratios financiers.

Outre la paye des personnels, qui représente un plus de 70 % des dépenses de l’université, les RCE donnaient surtout la possibilité à l’université de gérer ses ressources humaines de façon plus autonome : concours, gestion des postes, primes… « Dix ans après, le pari de la concomitance est gagné, analyse Frédéric Dehan. Nous sommes l’université française qui présente les meilleurs ratios financiers. Après tout, il est peut-être préférable de se faire opérer une seule fois que deux. Cela nous a sûrement compliqué la tâche, mais cela nous a aussi permis de raccourcir la durée du chantier. »

Jean de Miscault

Première des Initiatives d’excellence (Idex)

Serge Potier, vice-président délégué aux investissements d’avenir

Pour mémoire, les Idex, dans le cadre du Programme investissements d’avenir, visent à doter la France de grandes universités d’enseignement et de recherche capables de rivaliser avec les meilleures au monde. Le projet de l’Université de Strasbourg a été l’un des trois seuls à être pérennisés parmi les huit lauréats. Classé premier à l’issue de la période probatoire, il a été reconduit en 2016 sans limitation de durée avec un budget de 25,6 millions d’euros par an.

« C’est fantastique pour assouvir l’envie d’entreprendre de nos collègues, qui ont toujours des projets en tête »

« L’un des nombreux critères était la gouvernance et sa simplification, et comme nous étions la seule université à avoir déjà fusionné, cela a facilité la gouvernance et le pilotage de notre projet », explique Serge Potier, vice-président délégué aux investissements d’avenir. « Nous souhaitions que l’Idex soit inclusive : tout projet d’excellence et d’innovation pouvait en bénéficier, quel que soit le domaine, et pas seulement en sciences exactes, comme le craignaient certains. Cela a sans aucun doute participé à l’identification de la communauté à l’université unique, à son sentiment d’appartenance, à l’acceptation de la fusion. Nos collègues collaborent beaucoup plus d’une manière pluridisciplinaire. Nous avons pu mener des actions que nous n’aurions pas pu conduire sans ce financement. C’est fantastique pour assouvir l’envie d’entreprendre de nos collègues, qui ont toujours des projets en tête. Je pense notamment à la création de l'Institut d'études avancées de l'Université de Strasbourg (Usias) pour favoriser des recherches originales et pionnières, de l’Institut de développement et d’innovation pédagogiques (Idip), et du Pôle unique d’ingénierie (PUI) qui aide au montage de projets nationaux et européens. »

Stéphanie Robert

L’Opération campus

Yves Larmet, vice-président Patrimoine

Jamais un tel montant d’investissements immobiliers n’aura été réalisé pour l’université strasbourgeoise, ces cinquante dernières années. Lancée avant la création de l’Université de Strasbourg, l’Opération campus, qui bat son plein en ce début d’année 2019, est sans doute l’expression la plus palpable de la nouvelle université unifiée. Après un appel d’offres publié par le ministère en 2007, les trois universités strasbourgeoises ont appris en novembre 2008 que leur dossier était retenu. Et le montant financier a été révélé par la ministre, Valérie Pécresse, lors de la cérémonie officielle de la création de l’Unistra, le 5 février 2009. La fusion a-t-elle joué un rôle dans le choix du campus strasbourgeois ? « Ce que je sais, c’est que nous avons été retenus dans la liste des six premiers lauréats, répond Yves Larmet, vice-président Patrimoine. La fusion a-t-elle été un argument supplémentaire en notre faveur ? Je le suppose. »

Une trentaine de chantiers concernant 75 % des étudiants de l’université pour un investissement total de 330 millions d’euros.

Après quelques années de préparation et d’affinage du bouclage financier avec l’Etat, les collectivités territoriales et les banques publiques, les opérations ont vraiment démarré en 2014, notamment par la création et l’aménagement du parc du campus central, et devraient s’achever en 2023 par la rénovation de la cité universitaire Paul Appell. En tout, une trentaine de chantiers de rénovation, reconstruction, réhabilitation énergétique… concernant 75 % des étudiants de l’université pour un investissement total de 330 millions d’euros. « Une des particularités des chantiers de l’Opération campus est qu’ils sont le plus souvent réalisés en site occupé, insiste Yves Larmet. C’est un élément qui rajoute de la complexité à des opérations déjà délicates en termes techniques ou financiers. »

Jean de Miscault