Récemment, le terme "anthtropocène" a été proposé pour désigner l'intervalle de temps caractérisé par l'impact significatif des activités humaines sur le façonnement de la surface du globe. Cette subdivision du temps présente une double singularité : d'une part celle de sa durée brève, quelques siècles, celle de l'ère industrielle, face aux millions d'années des événements géologiques, et, d'autre part, celle de l'implication d'un unique acteur, Homo sapiens. Comment se justifie cette nouvelle division des temps géologiques ? Quelle est l'ampleur de l'impact anthropique sur la structuration de la planète ?
Depuis la nuit des temps, la physionomie de la Terre est recomposée en permanence par deux dynamiques aux actions antagonistes. Les forces telluriques s'alimentent dans les réservoirs de chaleur des profondeurs du globe et président à la dérive des continents et à l'édification des chaînes de montagnes. Le rayonnement solaire entretient le travail de sape des agents de l'érosion et contribue au nivellement des reliefs. Cette double dynamique assure le lent travail de refondation du globe terrestre, redessinant les géographies et alimentant les gîtes minéraux. Elle se décline en millions d'années, des durées qui échappent à l'entendement de l'homme.
À l'évidence, si l'homme ne saurait contrôler le travail des forces telluriques, il en subit quotidiennement les manifestations tels les séismes, les éruptions volcaniques, les glissements de terrain. En revanche, les performances croissantes des technologies ont élevé l'homme au rang d'agent actif de l'érosion et de la reconfiguration de la surface du globe. Son impact est particulièrement prégnant depuis l'ère industrielle c'est-à-dire l'anthropocène. Ainsi en est-il du volume des matériaux déplacés par les activités humaines à l'instar des exploitations minières et de l'extension des espaces dévolus aux monocultures et aux mégapoles. On estime qu'il représente près du double du volume des matériaux mis en mouvement par les agents naturels, les glaciers et les cours d'eau. L'homme est devenu un agent géologique.
Par voie de conséquence, l'homme est également un agent biologique. Suite à la réduction drastique des habitats naturels des flores et des faunes, à la pollution des sols et des nappes d'eau, à l'accélération du réchauffement climatique, un nombre croissant d'espèces vivantes disparaît. Ce bilan est encore amplifié par la constante progression de la population mondiale, sa course au profit et sa quête jamais assouvie de confort.
L'humanité s'achemine inexorablement vers un épuisement des ressources tirées de la planète. Ce constat se traduit dans le "jour du dépassement", date à laquelle l'homme a consommé l'intégralité des ressources que la nature est censée renouveler au cours d'une année. Bien que son mode de calcul soit sujet à controverse, le"jour du dépassement" n'en constitue pas moins un repère précieux sur l'état de la planète. En 1990, il s'affichait le 11 octobre ; en 2020 il était avancé au 21 août (et en 2019 au 21 juillet). Le constat est sévère. Une autre gestion de la planète s'avère vitale pour l'humanité. Développement durable ou développement soutenable ?