octobre 2018

L’implication des familles de patients

Les familles de patients atteints de maladies génétiques rares acquièrent souvent, au fil du temps, une connaissance fine du trouble de leur enfant. Le programme GenIDA* capitalise sur les connaissances de ces « experts » familiaux concernant les malades souffrant de déficiences intellectuelles ou d’autisme d’origine génétique afin d’améliorer la prise en charge de ces pathologies.

Florent Colin, chercheur à l'Institut de génétique et biologique moléculaire et cellulaire (IGBMC).
Florent Colin, chercheur à l'Institut de génétique et biologique moléculaire et cellulaire (IGBMC).

Ces dernières années, les progrès technologiques ont permis d’identifier un nombre croissant de mutations génétiques chez les déficients intellectuels et les autistes, permettant un diagnostic génétique dans plus de 40 % des cas. « C’est déjà un grand pas en avant, explique Florent Colin, chef du projet GenIDA. Avant cela, beaucoup de familles ignoraient que la maladie affectant leurs enfants avait une cause génétique. » Pour autant, le diagnostic de ces pathologies rares ne règle pas tout : les traitements actuellement proposés restent symptomatiques, et surtout, la grande variété de ces troubles (700 gênes différents impliqués) contribue au sentiment d’isolement des familles et des professionnels de santé qui les entourent.

Un site internet dédié, sur lequel les familles et les praticiens peuvent s’inscrire, témoigner, partager des informations.

Dans ce contexte, le professeur Jean-Louis Mandel, médecin généticien et chercheur, a eu l’idée de capitaliser sur l’expertise de facto des familles de malades. Celles-ci sont généralement soumises à de longs et difficiles parcours médicaux, qui les obligent à acquérir une très bonne connaissance de la maladie de leur enfant. Cette capitalisation se matérialise par un site internet dédié, sur lequel les familles et les praticiens peuvent s’inscrire, témoigner, partager des informations.

Rapprocher des cas similaires rares

Troubles musculo-squelettiques, problèmes cardiaques ou respiratoires, épilepsie, troubles du comportement : les malades souffrent généralement de plusieurs pathologies associées à leur déficience. « Ils prennent souvent beaucoup de médicaments pour en traiter les symptômes, avec des effets secondaires et des résultats variables. La mise en commun des témoignages des familles permet déjà de dégager des pistes d’amélioration de la qualité de vie des malades, précise Florent Colin. Elle permet aussi de rapprocher des cas similaires rares, pour rompre l’isolement de certaines familles. »

« Augmenter le nombre d’inscrits pour arriver à construire des cohortes représentatives autour de certaines maladies »

Le site, qui regroupe aujourd’hui plus de 1 000 familles et 60 praticiens de santé, se construit autour de questionnaires, portant aussi bien sur des données objectives de santé du malade, que sur la qualité de vie, les problèmes médicaux majeurs, la pharmaco-résistance. Et ce, dans un contexte international, puisque 28 % seulement des familles inscrites sont françaises (30 % américaines, le reste d’à peu près tous les coins du globe). « Nous espérons augmenter le nombre d’inscrits pour arriver à construire des cohortes représentatives autour de certaines maladies, conclut Florent Colin. Nous voyons émerger de nouvelles connaissances tirées des échanges d’information sur le site. Ainsi, dans le syndrome Koolen-de Vries, les familles ont déclaré à 45 % que leur enfant souffrait de troubles respiratoires dont l’asthme, ce qui n’avait pas été identifié auparavant comme une pathologie associée. » Une hypothèse qui reste à vérifier sur le plan clinique.

* Le programme GenIDA (Génétique de la déficience intellectuelle et des troubles du spectre autistique) est hébergé au sein du Département de médecine translationnelle et neurogénétique de l’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (IGBMC - Université de Strasbourg/CNRS/Inserm).

Caroline Laplane

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