octobre 2018

« L’accès ouvert favorise les collisions disciplinaires »

L’accès ouvert aux publications de la recherche impose de mettre en place des modèles économiques nouveaux. Marin Dacos (1) nous explique comment fonctionne le portail OpenEdition qu’il a fondé.

© Cédric Philippe

Comment le portail OpenEdition est-il financé ?

OpenEdition est une initiative publique, soutenue par des institutions majeures d’enseignement supérieur et de recherche2. Nous bénéficions aussi d’un équipement d’excellence et de financements européens.

Que répondez-vous aux craintes formulées par certains acteurs de l’édition envers l’édition électronique ouverte ?

Nous n’avons jamais eu autant besoin d’un travail éditorial de qualité. La plateforme OpenEdition est gratuite pour les éditeurs, qui n’ont pas à couvrir les investissements liés à la plateforme de diffusion, qui est hautement technologique, et ceux-ci peuvent se concentrer sur le travail éditorial. Celui-ci doit cependant être financé. C’est souvent le cas par du personnel fourni par le CNRS ou les universités. Mais ce n’est pas toujours suffisant. C’est la raison pour laquelle nous avons inventé le modèle freemium. Celui-ci combine le libre accès (« free ») à des fonctionnalités supplémentaires payantes (« premium »). Les revues qui ont fait le choix d’une diffusion freemium sont accessibles à tous au format HTML. Les formats téléchargeables sont réservés aux utilisateurs et institutions abonnés, qui nous soutiennent par leur abonnement freemium. Deux tiers des revenus issus du freemium vont aux revues pour financer le salaire des secrétariats d’édition ou le fonctionnement de leurs comités.

En quoi l’édition électronique ouverte transforme-t-elle les pratiques des auteurs et des lecteurs ?

Le choix de l’accès ouvert renforce une des fonctions majeures de l’édition : la diffusion. Ainsi, OpenEdition a reçu plus de 50 millions de visites en 2017. L’accès ouvert décloisonne aussi les silos de contenus et favorise les collisions disciplinaires grâce à ce qu’on appelle la sérendipité3 ».
L’édition ouverte permet aussi le développement de formes de communication scientifique directe, comme les blogs, grâce auxquelles les auteurs peuvent produire du contenu sur des questions de société plus rapidement.
Enfin, les lecteurs ont, eux, accès à une quantité de documents monumentale, qui sont désormais connectés entre eux par des millions d’hyperliens. L’accès ouvert permet une diversification géographique et sociologique du lectorat. C’est aussi, selon moi, un véritable gage de démocratisation de la science.

Propos recueillis par Floriane Beigbeder

1 Directeur du centre pour l’édition électronique ouverte (UMS 3287) et conseiller scientifique pour la science ouverte auprès du directeur de la recherche et de l’innovation au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ; il a reçu la médaille d’innovation du CNRS en 2016.
2 CNRS, Aix-Marseille Université, École des hautes études en sciences sociales et Université d’Avignon.
3 Fait de réaliser une découverte scientifique de façon inattendue à la suite d'un concours de circonstances fortuit et très souvent dans le cadre d'une recherche concernant un autre sujet.

OpenEdition, infrastructure nationale de recherche

OpenEdition est une infrastructure complète d’édition électronique au service de la communication scientifique en sciences humaines et sociales. Elle rassemble quatre plateformes complémentaires dédiées aux collections de livres (OpenEdition Books), aux revues (OpenEdition Journals, autrefois Revues.org), aux carnets de recherche (Hypothèses) et aux annonces scientifiques (Calenda). Reconnue comme infrastructure nationale de recherche par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, OpenEdition a recensé près de 54 millions de visites en 2017 soit 15,8 % de plus que l’année précédente.

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