octobre 2019

Bienvenue dans le futur

Les objets connectés font déjà partie de notre quotidien. Ils continuent à se déployer dans de nombreux domaines : transport, industrie, gestion des villes, agriculture, défense, sécurité civile. Et demain quelles seront leurs capacités ? Bienvenue dans le domaine de la recherche sur l’internet des objets au sein de la plateforme d’expérimentation Inetlab du laboratoire ICube.

Guillaume Schreiner, ingénieur d'études reponsable technique de la plateforme

La plateforme d’expérimentation Inetlab héberge l’Equipex FIT-IoT-LAB, outil à destination des chercheurs dans le domaine des objets connectés. Strasbourg n’en représente qu’une partie puisqu’il se déploie sur six sites à l’échelle nationale (voir encadré). « Cette plateforme sert à tester des algorithmes avec des objets réels à grande échelle avec plus de 1700 objets réels pour analyser la manière dont ils se comportent en mode collaboratif. C’est une grille de calcul indépendante d’un scénario envisagé par le chercheur », explique Guillaume Schreiner, ingénieur d’études responsable technique de la plateforme.

En optimisant leur temps de « parole », ils sont devenus plus autonomes énergétiquement

Opérationnelle depuis 2014, une période très longue à l’ère technologique, la plateforme a diversifié ses propositions technologiques passant de trois à plus d’une vingtaine de type d’objets en quelques années. Cela va de l’ampoule, à la puce radio, au thermomètre ou encore à l’interrupteur connecté. « Certains objets sont devenus obsolètes, d’autres sont dotés de technologies plus performantes. Il y une dizaine d’années, un objet captait une information et la transmettait sans prise en compte de son environnement proche. Aujourd’hui, la synchronisation entre les objets est bien meilleure. En optimisant leur temps de « parole », ils sont devenus plus autonomes énergétiquement », commente Guillaume Schreiner.

Chaque objet possède un code logiciel mais leur intelligence est minimale ; ils restent pilotés de l’extérieur. L’objet connecté capte des données qu’il transmet ensuite à un serveur qui crée une base de données. L’algorithme les analyse et répercute ensuite une décision vers l’objet. Les objets connectés, à l’image de nos téléphones portables, sont des fournisseurs insatiables de données, le fameux big data, outil indispensable pour l’IA. L’ensemble de ces données sont acheminées et stockées dans des datacenter, souvent géographiquement éloignés. Se pose aujourd’hui la question de l’évolution de la capacité de stockage de ces centres comme celui de leur consommation énergétique.

Inclure le discernement à l’intelligence artificielle

« Du cloud computing (informatique en nuage), nous sommes aujourd’hui à l’aube du fog et edge computing (informatique en brouillard, en périphérie). L’idée étant de diminuer la distance entre le lieu du traitement de données et l’objet. Ce système permet de traiter les données plus en amont, plus rapidement, en quantité moindre et également d’éliminer les données inutiles. Il s’agit en quelque sorte d’inclure le discernement à l’IA. »

L’étape suivante consistera à développer des objets capables de stocker suffisamment d’information pour prendre des décisions de manière autonome. À l’exemple d’un interrupteur dans une pièce de la maison qui s’adaptera à notre fonctionnement quotidien. Si ce scénario est bien en train d’être écrit, « nous sommes encore dans une situation intermédiaire », ajoute Guillaume Schreiner. « Les recherches que nous menons permettent de connaître les limites des objets connectés. Le développement de ces technologies liées à l’intelligence artificielle continue à être dans l’intérêt de nos sociétés en veillant à ce que l’IA ne contrôle pas nos vies. Nous travaillons notamment avec l’Eurométropole de Strasbourg sur le déploiement d’objets connectés pour optimiser l’éclairage urbain ou avec les Hôpitaux universitaires de Strasbourg sur un projet de cathéter connecté. »

Pense-bête

Extrait de l’ouvrage Le pense-bête (1962), où Fritz Leiber imagine l’humanité assistée par un aide-mémoire automatique qui la soulagerait de nombre de ses soucis… et pensées.

« - Gussy, tu ne reconnais pas le progrès quand tu le rencontres. Le mémoriseur est la plus grande invention depuis le langage. Sans aucun doute, c’est l’outil le plus extraordinaire jamais conçu pour intégrer l’homme dans tous les domaines de l’environnement. Dans l’état actuel des choses, un mémoriseur qui vient d’être acheté passe d’abord devant les services de Défense pour une première mise au point, ensuite chez le patron de l’acheteur, ensuite chez son psychiatre, ensuite chez le propriétaire de son abri, enfin, il arrive à lui. Tout ce qui est nécessaire au bien-être d’un homme est inscrit sur la bobine. »

Vous et l’IA ?

Hugo, étudiant en master de géophysique

« Dans mon activité j’automatise les systèmes de mesure. L’IA sert pour certaines tâches du quotidien. Par contre, il faut toujours un humain derrière pour contrôler. Mais il y a un côté pas rassurant, surtout si une machine commence à apprendre par elle-même. »

Axel, étudiant en deuxième année de licence physique

« Il faut se méfier de l’IA et de ce qu’on peut faire avec. C’est développé depuis des années et encore plus avec les capacités des ordinateurs qui augmentent. Par exemple, un robot qui a les mêmes capacités qu’un homme peut apprendre à sauter des obstacles. Qu’est-ce qu’il pourra faire par la suite ? On pourrait les utiliser dans la guerre. Je suis pour son utilisation en médecine, comme avec le robot Da Vinci qui a permis de soigner une zone du corps difficilement accessible. »

Frédéric Zinck