mars 2015

« Une collection aussi importante n’existe nulle part en France »

Après 1870 et le rattachement de l’Alsace à l’Allemagne, une nouvelle université est créée ; elle se dote d’un Institut de minéralogie dirigé par Paul Groth, un jeune professeur de minéralogie et de cristallographie reconnu pour avoir établi les bases de la classification moderne des minéraux. Denis Leypold, conservateur du musée de minéralogie de l’Unistra, nous éclaire sur le rôle majeur de ce jeune fondateur nommé en 1872.

En quoi consiste la classification établie par Paul Groth ?

Le classement des espèces minérales a toujours été fondamental pour étudier et comprendre le monde des minéraux. En raison de nombreuses difficultés liées aux limites technologiques et aux tâtonnements des recherches en laboratoire au XIXe siècle, on conservait une classification abordée exclusivement sous l’angle chimique. Paul Groth a proposé un système tout à fait moderne établi selon les caractéristiques cristallographiques et chimiques des minéraux. Après sa thèse soutenue à Berlin en 1868, sa classification a été adoptée en Europe et améliorée par Hugo Strunz en 1941.

Quels sont les principaux travaux qu’il a menés à Strasbourg ?

Paul Groth a enrichi la collection de minéralogie initiée par ses prédécesseurs de l’université française. Il a acquis environ 15 000 spécimens minéralogiques et a ainsi constitué une collection consacrée à la recherche et à la formation de minéralogistes et de cristallographes.
Il a également créé un atelier de fabrication de modèles cristallographiques en verre, bois et fil de fer. Les modèles ainsi construits étaient utilisés dans la reconnaissance morphologique et la détermination des éléments de symétrie des cristaux.
Paul Groth a équipé le laboratoire de minéralogie des instruments les plus modernes de l'époque et a développé une recherche spécialisée autour de la minéralogie-cristallographie par voies optique et chimique. En six ans, son travail a été considérable !

Des minéraux d’exception – collection du musée de minéralogie

Schlottwitz, Saxe. Echantillon de la collection de Jean Hermann (1738-1800).
7 x 8,5 cm.
Une note de travail de Jean Hermann précise : « Agate de Schlottwitz, fort singulière en ce que les couches parallèles sont dérangées dans plus d’un endroit, ce que je ne saurois m’expliquer comment la chose s’est faite. Si ce n’est par des tremblements de terre. » Crédit : Bernard Braesch
Touissit, Maroc. 13 x 14 cm.
Du nom du découvreur Xavier Wulfen. Crédit : Bernard Braesch
Échantillon rare dit « en oursin ».
Nouvelles-Galles du Sud, Australie. 6 x 6 cm. Crédit : Bernard Braesch
Dénommée ainsi en raison de sa morphologie proche du corail et issue d’un gisement de cuivre célèbre dans l’antiquité grecque.
Laurium, Grèce. 7 x 13 cm. Crédit : Bernard Braesch
Gauche modèle extérieur en verre d’un trapézoèdre trigonal et intérieur en papier d’un dipyramide dihexagonal du système rhomboédrique 8 x 19 cm.
Droite modèle extérieur en verre d’un pentogonotritétraèdre et intérieur en papier d’un didodécaèdre du système cubique 12 x 12 cm. Crédit : Bernard Braesch
Plaque sciée provenant de la plus grosse météorite connue à ce jour dans le monde (60 tonnes). Namibie. Crédit : Bernard Braesch
Crédit : Denis Leypold.

Quelles traces en reste-t-il ?

Aujourd’hui, il reste des modèles cristallographiques en bois et de nombreux modèles en verre et en fil de fer initiés par Paul Groth. Tous ont été restaurés. Une collection aussi importante n’existe nulle part ailleurs en France !
Du passage de Paul Groth restent des sources manuscrites fondamentales permettant un suivi des acquisitions depuis 1872. Il est par ailleurs auteur d’une publication éditée en 1878, qui présente le bilan de son travail considérable de conservateur.