L’arrivée du séquençage à haut débit modifie durablement le quotidien des laboratoires. Automatique, rapide et peu onéreuse, cette technique confronte les biologistes à une question de leur temps : les big data. Dès lors, il devient essentiel de former les étudiants à ces nouveaux protocoles expérimentaux tout autant qu’à l’exploitation de leurs résultats.
Pour les biologistes, les innovations de la biologie moléculaire représentent à la fois une formidable opportunité de recherche et un enjeu stratégique. Celui-ci est de taille, puisque les outils efficaces pour exploiter les résultats expérimentaux issus de ces techniques restent à inventer. « L’analyse de transcriptomes1 est cruciale pour comprendre les mécanismes biologiques du cancer, par exemple. Mais la masse de données produite est telle qu’il n’est pas envisageable de les traiter manuellement », explique Bruno Kieffer. Le traitement des données se fait grâce à des outils mathématiques et informatiques complexes, nécessitant un savoir-faire particulier. « Ces compétences ne peuvent pas être l’apanage des seuls informaticiens et statisticiens, il est essentiel que les biologistes s’en saisissent. C’est pourquoi nous avons créé un enseignement spécifique », renchérit-il.
Créer des passerelles entre disciplines
Ainsi est née l’UE Traitement et flux de données, fruit d’un partenariat avec la faculté des sciences de la vie. « Nous avons créé un parcours complet grâce à l’intervention de confrères informaticiens et statisticiens ». A la clé, des cas pratiques, permettant aux étudiants d’appliquer les théories enseignées. « Notre but est de leur donner les capacités de faire le lien entre les technologies qu’ils utilisent et les questions biologiques qui sont posées, afin d'adapter leurs protocoles expérimentaux. »
Ces compétences ne peuvent pas être l’apanage des seuls informaticiens et statisticiens, il est essentiel que les biologistes s’en saisissent
Au cœur de cette initiative, la volonté partagée de plusieurs chercheurs de créer des passerelles entre disciplines. « L’université de Strasbourg, une des premières universités pluridisciplinaires de France, possède tous les atouts pour être leader dans ce type d’enseignements », s’enthousiasme Bruno Kieffer avant d’ajouter : « avec les récents développements autour de l’intelligence artificielle2, il me paraît primordial de nous saisir de ces questions ». Pourquoi ne pas imaginer une UE consacrée aux applications des techniques de l'intelligence artificielle en médecine, chimie, ou sciences sociales ? « Qui sait, ce projet donnera peut-être lieu à un prochain financement ? » conclut-il, dans un sourire.
Fanny cygan
1 Résultat de l’activité de transcription du génome, soit un ensemble gènes qui seront traduits en protéines.
2 NDLR : l’ordinateur Alphago a battu le numéro 1 mondial du jeu de go en mai 2017, marquant ainsi un tournant décisif dans l’essor de l’intelligence artificielle.
En 2015, L’ESBS a obtenu un financement Idex pour l’achat d’un robot de pipetage pour l'expérimentation à haut débit. Cet appareil permet d’automatiser les approches expérimentales selon des standards quasi-industriels. Avec cet équipement de pointe, l’école d’ingénieur investit et permet à ses étudiants d’expérimenter sur des machines semblables à celles qu’ils trouveront demain, dans les industries.