Les mondes virtuels associés aux jeux sérieux, de l’anglais serious game, offrent de nombreuses potentialités en termes d’apprentissage et de mise à disposition de ressources pédagogiques. Dans ces environnements virtuels, c’est le jeu qui s’adapte au scénario pédagogique et ouvre des possibilités quasiment infinies.
Dans l’emploi du temps de Jonathan ce matin : une immersion dans les rituels de purifications de la communauté amérindienne des sioux, un cours de pharmacie avec les collègues de sa promo, un cours de langues et un moment d’échanges avec d’autres étudiants du campus… le tout par l’intermédiaire de son avatar en se connectant au monde virtuel de l’Université de Strasbourg depuis le Paraguay. Un scénario encore fictif pour valider une formation mais un concept d’entrainement et d’apprentissage bien réel développé dans l’Environnement virtuel pour l’enseignement et la recherche : le projet Ever porté par la Direction des usages du numérique (DUN) de l’Université de Strasbourg.
« Il s’agit d’un socle de 3D immersive dans lequel différentes régions thématiques sont créées par des enseignant-chercheurs et d’autres partenaires. Plus d’une vingtaine de régions ont ainsi été créées associant des contenus pédagogiques et de recherche, ainsi que les prémices d’un campus virtuel. La seule limite de cet espace est l’imagination des différents créateurs », explique David Gauckler, directeur adjoint de la DUN et porteur du projet Ever. Dans ces conditions, pourquoi recréer une salle de cours classique ou une salle d’exposition ? Michel Nachez, ethnologue à l’Unistra et spécialiste des communautés virtuelles, a été l’un des premiers à se lancer dans l’aventure. Il a ainsi reconstitué un village Teko de Guyane et différents matériels ethnographiques – dont des objets dogon du Mali issus de la collection de l’Institut d’ethnologie. « Les étudiants ont la possibilité de toucher et de manipuler des objets rares souvent préservés sous clés. L’un des prochains développements consistera à recréer certaines danses traditionnelles qui ne sont plus pratiquées. L’étudiant pourra prendre le rôle de l’observateur ou être acteur de ces rites. Ce dispositif permet ainsi d’avoir une approche physique et comportementale autour d’un sujet de recherche, et constitue un espace d’enseignement virtuel presque naturel pour les étudiants. »
Dans une autre région se trouve Pharma3D : une pharmacie d’officine expérimentale virtuelle regroupant entre autre des ressources pour les étudiants et les professionnels, et un espace de mise en situation des étudiants à la pratique de l’officine. « Pharma3D est un moyen de compléter l’acquisition de connaissance dans un espace ludique. L’étudiant se retrouve face à la réalité de l’officine, le jeu en tant que tel n’est qu’une partie de l’interface. C’est également un moyen de capitaliser les traces pédagogiques, l’expérience des uns bénéficiant aux autres », commente Pascal Wehrlé, professeur de pharmacie à l’Unistra à l’origine du projet Pharma3D. Les domaines à explorer sont encore vastes, et la banalisation des casques d’immersion pourra certainement démultiplier les possibilités de ces mondes virtuels. « On est dans une démarche prospective qui n’a potentiellement pas de limite », conclut David Gauckler.